XV
Rolihlahla
P- Vous avez choisi de
commencer votre chronique par un conte.
C’est l’Avent et rien ne me prépare mieux aux réjouissances des Fêtes
qu’un conte.
Étant donné l’actualité j’ai déniché une petite histoire qui nous vient
du peuple Xhosa, l’ethnie qui nous a donné l’archévêque Desmond Tutu, la
chanteuse Mariam Makeba, le révolutionnaire Stephen Biko et bien sûr Nelson
Mandela.
Il était une fois : Qumatha, le Créateur du monde.
Il veut annoncer à ceux qui peuplent la Terre, qu’ils sont immortels. Or
il choisit de faire livrer son message par un caméléon… Allez savoir pourquoi…
C’est une longue expédition pour une créature aux pattes si courtes, on
s’en doute. Au milieu de sa course, il choisit de prendre une pause.
Voilà que survient un lézard qui lui demande! Que fais-tu, où vas-tu?
Le caméléon de lui répondre : je reprends mon souffle. Qumatha m’a
demandé de livrer aux hommes un message!
Ah bon! Et lequel?
Après la vie, c’est la vie!
Tiens donc! Fais le lézard, qui du coup, repart.
Moins fatigué, plus agile de ses pattes il se présente aux gens de la
Terre et leur annonce :
J’ai un grand message que je tiens de Qumatha :
Les gens s’attroupent et l’écoutent.
Je vous annonce qu’après la vie, c’est la mort!
(Pauvre lézard, il avait 50 % des chances d’avoir tort
Stupeur et désolation. Le peuple est affligé d’une grande peine.
Quand quelques jours plus tard survient finalement le caméléon qui
demande à son tour l’attention.
Mais personne ne le remarque. Il comprend qu’il est devenu gris, comme
la tristesse autour de lui.
Alors il choisit de s’illuminer des couleurs de l’arc en ciel certaines
gens le remarquent et alors quelques-uns s’approchent
De la part de Qumatha, je vous annonce qu’après la vie… c’est la vie.
Mais plus personne n’y croit. Les hommes et les femmes ne veulent croire
à l’immortalité et depuis lors, les humains meurent.
P : Quoi? C’est tout? Non
mais…
Je me garde bien de vous imposer la morale de cette histoire. À chacun
de trouver dans son cœur d’enfant, une solution à cette énigme.
P-Alors parlons de Mandela.
E- On l’appelle aussi Madiba, dérivé du nom d’un ancien chef de son clan.
On entend aussi Tata. Qui veut dire papa, comme on dit de lui que c’est
le père de la nouvelle nation sud-africaine, la nation arc en ciel.
Mais le prénom qui lui a été donné à sa naissance est
Rolihlahla.
Qui veut dire : Celui qui tire la branche de l’arbre, une
expression pour dire un… fauteur de troubles!
Le prénom Nelson, ne lui a été donné qu’à son premier jour d’école. Il
était commun pour les instituteurs de rebaptiser des enfants aux noms
difficiles à prononcer ou perçus comme inférieurs par la classe coloniale.
Autant de noms, autant d’aspects de cette figure qui nous a quitté.
Moi je préfère Rolihlahla, le fauteur de troubles, le malcommode… le
dissident.
Si Mandela avait été un enfant de choeur, un béni oui-oui pensez bien
qu’il n’aurait jamais rien accompli de ce qu’on lui doit.
P- Mandela était boxeur.
E- Il disait de lui-même qu’il n’était pas assez puissant pour compenser
son manque de rapidité, et pas assez rapide pour compenser son manque de
puissance,
Mais l’entraînement l’a bien servi. J’imagine mal un coureur de
marathon, ou un marcheur comme Gandhi survivre au régime de Robben Island à
casser des cailloux ou passer de longues heures confiné dans une cellule trop
étroite.
Non, il fallait la discipline de la boxe, capable de se créer un espace
dans le ring. Quand on garde à l’esprit l’athlétisme de Rolilhahla et son
intérêt pour la boxe certaines de ses citations résonnent plus fort :
« Un cœur bon et un bon
esprit forment toujours une redoutable combinaison »
Ou lorsqu’il dit que le courage n’est pas l’absence de peur, mais la
capacité de vaincre la peur.
On le dit moins ces jours-ci parce qu’il convient de souligner le
rassembleur, celui qui libère à la fois l’opprimé Et l’oppresseur, mais
idéologiquement, Mandela cognait fort de la gauche.
Il n’a pas hésité à reprocher aux Etats-Unis d’être une menace pour la
paix dans le monde.
Il a reconnu les efforts de Cuba pour assister l’Afrique dans son affranchissement.
Il a aussi dit que la liberté du monde était incomplète sans la liberté
des Palestiniens.
P- Un bon boxeur se doit de
savoir encaisser, aussi.
À ce titre : Relisons quelques strophes préférées de Mandela, sorties
de la plume de William Henry et son poème Invictus
P- Celui qui a donné son nom
au film
de Clint Eastwood!
« Dans de cruelles
circonstances
Je n’ai ni gémi, ni pleuré
Meurtri par cette existence
Je suis debout bien que
blessé.
Aussi étroit soit le chemin,
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maître de mon destin,
Je suis le capitaine de mon âme.»
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maître de mon destin,
Je suis le capitaine de mon âme.»
Rolilhahla dit un jour que son plus grand regret était de ne pas être
devenu un champion poids lourd.
Il aurait sans doute aimé parmi tous les hommages, celui que lui a rendu
LE champion Mohammed Ali que voici :
« Il nous a fait réaliser
que nous sommes les protecteurs de nos frères et que nos frères sont de toutes
les couleurs. Il nous a appris que le cœur, l’esprit, l’âme ne pouvaient être
restreints par l’injustice raciale et économique, les barreaux de prison ou le
fardeau de la haine et la vengeance.
Aujourd’hui il s’élève par
delà l’arc en ciel, libre pour l’Éternité.
J’ajouterai pour conclure :
Gardons-nous de déifier Mandela
D,abord ce n,est pas dans le genre du personnage aussi modeste…
Mais surtout :
Et ce serait nous priver de l’espoir de l’imiter
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire