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Movember
P- Avec novembre vient le
temps des moustaches.
E- Et l’occasion d’offrir un examen approfondi d’un sujet par ailleurs parfaitement
superficiel.
À moins d’émerger d’une caverne, chacun
sait que novembre est désormais indissociable de Movember.
Et puis si vous avez été tenu en captivité depuis
10 ans, le sujet est susceptible de vous emballer puisque vous êtes sans
doute en train de vous demander quoi faire de votre barbe.
Movember est un
mouvement qui nous vient d’Australie. Voici ce que nous apprend l’encyclopédie :
« Constatant que les hommes sont moins attentifs à leur santé que les
femmes et que les maladies masculines demeurent taboues, des Australiens
invitent 30 hommes à se laisser pousser la moustache pendant 30 jours. Cette
opération a pour but d'attirer l'attention sur les maladies masculines tel que
le cancer de la prostate et de produire un financement pour la recherche
médicale. »
Voilà un usage
certes louable d’un phénomène autrement… encombrant.
P- Est-ce pour cela que vous affichez aujourd’hui
un assemblage de poils nouvellement taillés?
E- Je ne suis pas
en campagne de financement.
Et puis je me
suis fait signaler par un movembriste certifié, Gaetan Benoit que le fait que les poils m’occupant
le faciès sont antérieurs au premier novembre et par conséquent
ma candidature est irrecevable en vertu du protocole.
Je le dis pour
ceux qui seraient tentés par l’aventure.
Il convient, pour
rester dans les règles que toute forme de pilosité du visage soit rasée le jour
du premier novembre.
Les jours et
semaines qui suivent se veulent une forme de mortification. On laisse les gens
s’informer de la saleté qui nous traîne sous le nez et on souffre
silencieusement du picotement inévitable qu’amène la poussée de la dite
moustache. Jusqu’à ce que la chenille devienne un papillon… de velours. (À moins qu'elle ne devienne qu'une chenille plus grosse...)
Et bien sûr au
dernier jour de novembre après avoir annoncé les sommes recueillies, il
convient d’abolir la trace hirsute pour le plus grand soulagement des donateurs
charitables.
P- Mais alors, la question s’impose. Pourquoi tu
te fais pousser… ça!
E- J’suis pas sûr. J’y réfléchis.
À première vue c’est sans importance.
Et à la deuxième vue aussi
- tout compte fait
Toutefois, je ferai valoir que les choses inutiles sont les plus
nécessaires. La preuve n’est plus à faire. L’humain après avoir satisfait le
besoin de se nourrir, de respirer, de se protéger des éléments, de s’habiller,
se reproduire... de se rhabiller ne fait que dans le superflu.
Dans sa pyramide des besoins, le psychologue
Abraham Maslow place les
besoins que je viens d’énumérer à la base. À l’étage viennent les besoins de
sécurité; Un environnement stable et prévisible, sans anxiété, ni crise.
Puis en grimpant encore on trouve le besoin d’appartenance et d’amour..
Reprenons l’escalier. Encore plus haut. Se trouve le besoin d’estime, la
confiance, et le respect de soi,
la reconnaissance et l’appréciation des
autres.
La somme de tous ces besoins satisfaits, le sommet
de la pyramide est
l’accomplissement de soi.
Vous voyez le rapport à la
moustache?
P – Honnêtement? Non!
E- Et pourtant Abraham Maslow portait bien une moustache! J’ai vérifié.
Peut-être que pour mieux embrasser le sujet il faudrait je brosse un
tableau plus large. Je vais donc inclure la barbe.
P- Où est ce que ça nous amène?
E- Aux origines du monde. Je suis remonté aux sources. La Genèse. Au
début Dieu fit la lumière, puis il sépara les eaux du ciel, inventa la terre
ferme, les végétaux, les astres, les poissons, puis les animaux et finalement
les hommes à son image.
Au septième jour on dit qu’il se reposa.
Après une semaine pareille j’pense pas qu’il ait eu envie de se raser.
Chez les Grecs, c’est une cosmogonie complètement différente mais le
résultat est le même. Zeus a une barbe. Des milliers d’années d’iconographie,
nous le confirment.
Tant et si bien que j’me pose la question!
Aussi hérétique que ça puisse paraître…
Est-ce que la barbe serait venue AVANT le Créateur?
P- Silence consterné
E- Je laisse le soin aux théologiens et astrophysiciens d’y répondre.
Toujours est-il qu’on peut supposer que l’homme n’ait pu se raser avant
l’invention de la pierre polie ou la bouteille cassée, ce que je déconseille vivement
Il faudra attendre les pharaons pour trouver une représentation de la
barbichette.
Et puis Rome où tout à coup, le rasage impose son empire. Dès lors, la
moustache est réservée aux barbares et autres résistants. Je sais- j’ai lu Astérix.
Puis vient Charlemagne à la barbe fleurie.
Et depuis… c’est la lutte. D’une part, la civilisation qui rase et
taille -Tintin - et d’autre part, ceux qui font trembler le monde: les Ptolémée, Galilée,
Marx, Darwin, Freud, Fidel Castro, et
le capitaine Hadock!
Entre les deux, les moustaches—Tournesol.
Le cardinal Richelieu, les trois mousquetaires.
La moustache d’Hitler
que personne n’ose plus porter. Mais qui est aussi celle de Charlie Chaplin que
personne ne peut remplacer.
On peut remonter jusqu’à Lénine ou reculer jusqu’à
Staline. Et pareil dans toutes les disciplines : Dali, Rodin, Victor Hugo,
Mark Twain, Maupassant qui y consacra une nouvelle, et aussi Brahms, Brassens,
Frank Zappa, Freddy Mercury.
Dans le sport les champions du baseball cette année sont les barbes de
Boston. Au hockey qui ne se souvient de la moustache Lanny McDonald, l’homme
dont personne n’a jamais vu la lèvre supérieure!
Dans le sport les champions du baseball cette année sont les barbes de
Boston. Au hockey qui ne se souvient de la moustache Lanny McDonald, l’homme
dont personne n’a jamais vu la lèvre supérieure! Et puis Mark Spitz qui pris à Munich 7 fois l’or dans une discipline où
tout les compétiteurs sont rasés de frais.
Pourquoi la moustache? Répondons comme l’alpiniste à qui on demande
pourquoi il gravit telle montagne.
P – « Parce qu’elle est
là. »
E- Signalons que celui qui le premier grimpa l’Everest Edmond Hillary ne
portait pas la barbe… quand il a commencé
son ascension!
J’ajouterais qu’aujourd’hui, en politique les moustaches et barbus sont
rares du moins à l’extérieur des régimes religieux. Il y a eu Jack Layton. Il y a maintenant Mulcair.
Par contre tous portent la cravate ou la boucle qui ne sont à mes yeux
que des barbes et des moustaches postiches.
Non, je ne sais pas pourquoi je porte du poil au visage, une moustache
et des favoris. Sans doute pour joindre l’inutile au désagréable.
Pour clore : J’en appelle au proverbe.
J'ai noté ce proverbe de fin de chronique et oserai le ressortir au besoin... si tu me le permets, bien sûr.
RépondreSupprimerMerci pour cette édifiante chronique pileuse.